PSYCHÉDÉLIQUES ENTRE SCIENCE ET SPIRITUALITÉ par Dr.Olivier Chambon et Stephan Schillinger
Les thérapies psychédéliques n’ont jamais autant fait parler d’elles. Que sont ces substances qui les accompagnent (LSD, MDMA, DMT…) ? En quoi l’ouverture de conscience qui en découle est-elle thérapeutique ? Et en quoi une dimension spirituelle est-elle essentielle et bénéfique à ces pratiques? Dans cet ouvrage, Stephan Schillinger et le docteur Olivier Chambon mettent en commun leurs expériences, leurs ressources mais aussi leurs différences. Ils mènent une réflexion riche et très large sur leur complémentarité pour aborder les principales facettes de l’expérience psychédélique, de la plus scientifique à la plus spirituelle.
La genèse des religions et des principales voies spirituelles, le chamanisme et les cultes à mystères de l’Antiquité grecque, les dernières découvertes en neurosciences, les résultats des recherches cliniques et anthropologiques sont autant de territoires sur lesquels naviguent ces deux experts des psychédéliques et des enthéogènes, dans un langage très accessible, donnant lieu à un véritable dialogue à cœur ouvert, libre et intime.
Psychiatre et psychothérapeute, cofondateur du diplôme universitaire de psychothérapie (UCB Lyon 1), formé au chamanisme et à de nombreuses psychothérapies, spécialisé dans l’utilisation thérapeutique des états élargis de la conscience, Olivier Chambon est notamment l’auteur des ouvrages Les Bases de la psychothérapie, La Médecine psychédélique, Psychothérapie et Chamanisme et coauteur, avec Laurent Huguelit, du livre Le Chamane et le Psy.
Stephan Schillinger, suivi par plus de 180 000 personnes sur les réseaux sociaux, est auteur dans le domaine de la spiritualité, conférencier et consultant. Expérimentateur des états élargis de la conscience depuis deux décennies, il tente à travers ses écrits de proposer un lien entre réalité et dimensions invisibles, en créant des ponts entre sciences et traditions spirituelles. Il est notamment l’auteur de la série de livres « Par un Curieux Hasard » et de La Sagesse interdite, paru aux éditions Véga.
Extrait du livre
p.20 OLIVIER : (…) Paradoxalement, alors que je suis médecin psychiatre et que j’ai donc soigné beaucoup de pathologies psychiques, je m’intéresse dorénavant principalement au développement spirituel avec les psychédéliques.
Pourquoi ? Parce que, de toute façon, tout ce qui concerne la prise en charge des pathologies psychiatriques ou physiques par les psychédéliques est en train d’être amplement étudié et validé. Beaucoup de gens s’occupent déjà très bien de cet aspect-là. L’intérêt médical des substances psychédéliques devient évident.
Très probablement, dans les quelques années qui viennent, dans certains pays comme les USA, le Canada ou l’Angleterre, les psychédéliques seront prescrits sur ordonnance légalement pour plusieurs pathologies bien reconnues : les troubles post-traumatiques, les dépressions résistantes aux antidépresseurs, différents types d’addictions, certains troubles obsessionnels compulsifs, etc. C’est déjà le cas en Suisse, pays pionnier en ce domaine, mais aussi tout récemment (début 2023) en Australie, pour la psilocybine et la MDMA.
Je dirais qu’il s’agit de la partie la plus facile de l’histoire, celle qui concerne des patients triés sur le volet, sélectionnés et suivis par des médecins ou des professions médicales dans des cliniques spécialisées pour un prix assez élevé. Cela ne concernera donc certainement pas tout le monde.
Je pense que, pour utiliser le potentiel énorme de ces substances – le potentiel pour l’humanité, pour sa croissance, son développement personnel et spirituel, et même pour le développement d’une société plus juste incarnant vraiment les valeurs « Liberté, Égalité, Fraternité » -, on a besoin d’un vrai coup de pouce pour augmenter le niveau de conscience global. Un coup de pouce qui puisse toucher un grand nombre de personnes hors pathologie médicale ou psychique, en tout cas accessible potentiellement pour tous ceux qui seront intéressés. Cela dans certaines limites bien sûr, car on verra qu’il y a certaines contre-indications pour ces médecines-là. Pour certaines personnes, il vaut mieux trouver une autre voie d’éveil spirituel que celle-ci, qui est quand même assez intense et escarpée. Dans l’absolu, ce serait une médecine qui pourrait bénéficier à tous ; mais, dans le relatif, il y a des gens qui ne la supporteraient pas bien.
De plus, il faut une préparation sérieuse en amont. En tout cas, c’est une voie d’ascension et d’éveil – « d’épiphanie », pourrait on dire assez remarquable, assez fiable et rapide, pour un grand nombre de personnes.
STEPHAN : Tu évoques l’« épiphanie » qui, au-delà de la stricte dimension religieuse, est la compréhension soudaine de l’essence ou de la signification de quelque chose. Cela évoque spontanément l’éveil spirituel des bouddhistes ou des hindouistes, qui en parlent depuis plusieurs millénaires à travers divers mots et divers degrés. On parle vraiment ici d’un changement radical de perception de la nature et de la réalité à la suite d’une expérience transcendante qui, pour beaucoup, change tout pour de bon. »
P. 96 STEPHAN : « Dans deux cents ans, nous regarderons les scientistes et les matérialistes de la même manière que nous regardons aujourd’hui ceux qui affirmaient au Moyen Âge que la Terre était plate et qui brûlaient ceux qui affirmaient qu’elle était ronde. Nous sommes aujourd’hui à un degré similaire d’obscurantisme à celui du Moyen Âge, où le dogme religieux régnait sur l’Europe au mépris de toute observation rationnelle et scientifique. La réaction civilisationnelle à cette triste période de plusieurs siècles est si violente que nous sommes propulsés, depuis deux siècles, avec une force inouïe dans la polarité inverse, consistant au déni et au mépris de toute considération non seulement religieuse et dogmatique – ce qui, dans une certaine mesure, est une bonne chose -, mais de toute considération spirituelle. Cette dérive consistant à jeter le bébé avec l’eau du bain est si extrême quelle nous a séparés de tout ce qui n’est pas mesurable ou reproductible. Elle n’est pas scientifique mais scientiste, matérialiste, irrationnelle et dogmatique.
Son contrepoids raisonnable et rationnel serait un positionnement scientifique post matérialiste qui inclurait les dimensions transcendantales, spirituelles, noétiques, vérifiées par la science. Ce serait un endroit où la démarche scientifique rejoindrait la spiritualité, et où les études à ce sujet ne seraient pas simplement balayées par un revers de main, mais considérées pour ce qu’elles sont. »